Cher journal,
Il y a quelques jours, j’ai animé une Fresque du Numérique, et cet atelier a été pour moi l’occasion de réfléchir à la notion de point de bascule.
Je te raconte en quelques mots.
Les participants des fresques ont souvent plus ou moins les mêmes comportements. Certains sont plus sensibilisés que d’autres aux problèmes sociaux et environnementaux posés par le numérique, mais tous ont globalement envie d’en savoir plus et sont prêts à bousculer leurs habitudes ou à remettre en cause leurs certitudes dans l’espoir de “faire quelque chose de positif pour la planète”.
Or, lors de ce récent atelier, la dernière partie consacrée au “passage à l’action” ne s’est pas déroulée comme prévue.
Plutôt que de discuter de façon positive et constructive autour des propositions d’actions simples et très concrètes que chacun peut décider de mettre en place pour réduire les impacts de ses usages numériques (ex: acheter reconditionné, allonger la durée de vie de ses équipements, faire réparer son smartphone…), les participants se sont enfermés dans une sorte de renoncement qui était un mélange de castastrophisme, de désespoir et de déni.
Parmi les arguments entendus qui m’ont le plus marqué, je pourrais te citer :
- on n’a qu’une vie, il faut en profiter, donc je ne changerai rien de mon mode de vie actuel
- même si je faisais des efforts de mon côté, les autres ne bougeront pas, donc autant ne rien faire
- le numérique a pris trop de place dans nos vies, la situation actuelle est trop grave pour que l’on puisse changer quoi que ce soit
Bien sûr, lorsque l’on s’intéresse un peu à la problématique de la transition écologique, on sait bien qu’aucun de ces arguments n’est audible.
Soit ils dénotent un égoïsme flagrant contraire à toute évolution positive de notre société (mon confort personnel a la priorité sur tout le reste), soit ils sont simplement infondés (la situation n’est pas trop grave et il ne sera jamais trop tard pour agir).
Et tout cela nous amène à la notion de point de bascule décrit par BonPote dans cet article.
Partant du principe qu’une bonne partie de la population est réfractaire au changement nécessaire pour engager la transition écologique (environnementale, énergétique), car celle-ci implique de remettre en cause de nombreux aspects de notre mode de vie, quel pourcentage de la population doit être convaincu de cette nécessité pour que les choses bougent réellement ?
D’après les sources citées par BonPote, ce point de bascule est situé entre 3,5% et 10%.
A partir de ce seuil, c’est-à-dire à partir du moment où environ 7% de la population (pour prendre une médiane) sera convaincu qu’il faut changer les choses et aura commencé à bouger, le comportement singulier deviendra la norme.
Rapportés à l’échelle de la population française, ces 3 à 10% représentent quelques millions de personnes qui doivent basculer “du bon côté” pour que les propositions d’actions de la Fresque du Numérique deviennent des gestes de la vie quotidienne qui seront in fine adoptés par tout un chacun.
Quelques millions de personnes, cela peut paraître beaucoup…
Oui mais regarde: récemment, l’association de la Fresque du Climat a célébré le cap du million de participants !
Et à la Fresque du numérique, nous en sommes à 50’000 personnes sensibilisées !
Alors oui, il reste un long chemin à parcourir, mais un penseur chinois n’a-t-il pas dit que “un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas” ?
Je te laisse, Lao Tseu et moi devons partir animer une fresque !
Prends soin de toi cher journal