Journal de Bord #139 – Quelles sont les dernières données disponibles concernant l’estimation de l’empreinte environnementale du numérique ?

Numérique Responsable

Gauthier Roussilhe a récemment publié un article très documenté sur le site bonpote pour faire une synthèse des dernières informations connues sur ce sujet.

Comme souvent, les appareils et équipements numériques étudiés sont répartis en 3 familles :

  • équipements utilisateurs, aux usages généralistes (ex : smartphones, laptop…) ou spécifiquement dédiés au divertissement (ex : consoles de jeu, casques de réalité virtuelle
  • réseaux fixes (fibres optiques) et mobiles (antennes 4G, 5G), satellites en orbite basse (ex : Starlink)
  • data centers, généralistes ou spécialisés sur l’IA

Les données partagées concernant ces 3 familles d’équipements sont les suivantes : 

Equipements utilisateurs

L’empreinte de ces équipements est liée

  • d’une part à la fabrication des composants (semi-conducteurs), dont l’empreinte par cm² a augmenté au cours des 10 dernières années
    • le développement de puces spécifiques pour l’IA va accentuer cette tendance
  • d’autre part à leur process de fabrication globale ainsi qu’à leur nombre et leur durée de vie
    • l’augmentation de la taille des écrans, du nombre d’équipements possédés et l’incitation au renouvellement (par simple tendance consumériste ou pour pouvoir disposer d’équipements IA-ready) sont autant de facteurs contribuant à augmenter leur empreinte carbone 

Une fois la phase de fabrication terminée, les émissions de CO2 sont fortement corrélées au mix énergétique de chaque pays

  • Dans les pays où la production d’électricité repose principalement sur les énergies fossiles, l’empreinte carbone est associée davantage à la phase d’usage que de fabrication

Réseaux

  • il est intéressant de savoir qu’il n’y a pas de lien direct entre consommation électrique des réseaux et transfert de données (ex: regarder une vidéo en 1080p ne consomme pas plus de courant qu’une vidéo en 480p)
    • la consommation électrique liée au trafic instantané représente environ 10% seulement de la consommation des réseaux mobiles
    • pour les réseaux fixes, la consommation électrique est sensiblement la même qu’il y ait du trafic ou non
  • La consommation électrique des réseaux découle davantage de la gestion des infrastructures :
    • déploiement de nouvelles antennes (pour augmenter la couverture)
    • remplacement des antennes existantes par des modèles plus récents
    • mise en veille des infrastructures ou utilisation d’électricité décarbonée
  • L’empreinte environnementale des réseaux satellites en orbite basse est difficile à estimer à l’heure actuelle, par manque de recul sur cette technologie
    • Les émissions de CO2 sont liées à la durée de vie courte (5 ans) des satellites, à leur nombre (pour avoir une couverture suffisante) et à l’étape de mise en orbite (qui nécessite de grandes quantités de carburant pour fusée)
    • D’autres conséquences pourraient également être observées, en lien avec le largage directement dans l’atmosphère de substances polluantes et avec potentiellement incidentes sur les mécanismes du dérèglement climatique (perturbation de l’effet de serre) 

Data center

  • Le terme data center désigne d’une manière générale des salles serveur, qu’il s’agisse de locaux appartenant à des entreprises pour du stockage “on premise” ou de bâtiments dédiés aux infrastructures cloud proposées par des opérateurs spécialisés
  • Leur empreinte carbone dépend de différents facteurs (nombre de machines physiques, taux d’utilisation, PUE du site…)
  • Les spécialistes s’accordent à considérer que la consommation électrique des data centers devrait doubler entre 2023 et 2030, principalement du fait du développement récent et très important des IA génératives, extrêmement consommatrices d’énergie
  • Cette augmentation se traduit d’ores et déjà par
    • une augmentation des émissions de de CO2, liées au fonctionnement de centrales électriques à gaz ou à charbon, dont la (re)mise en service pour subvenir aux besoins de production est beaucoup plus rapide que des sources de production décarbonées 
    • une augmentation de la consommation d’eau, nécessaire pour le refroidissement des salles serveurs et la production d’électricité
    • des tensions locales sur ces 2 ressources (eau et électricité) avec des conflits d’usage entre les opérateurs de data centers et les sociétés civiles (consommation par les habitants et par les entreprises dans le cadre de la réindustrialisation et l’électrification des usages)

En conclusion, Gauthier Roussilhe souligne le fait que les années à venir verront une augmentation significative de l’empreinte environnementale du numérique (émissions de CO2, consommation d’eau et de ressources, pollutions diverses), même si celle-ci ne sera pas exponentielle comme cela avait été envisagé.

De nombreux facteurs influencent ces émissions, en particulier la montée en puissance de l’utilisation des IA génératives, qui implique la production et l’utilisation d’équipements et de services toujours plus puissants et consommateurs d’énergies.

Au final, si la dimension GreenIT fait aujourd’hui l’objet de nombreuses études, il serait nécessaire d’étudier en retour la contribution du numérique à la décarbonation de nos modes de vie (IT for green).

Sources

Laisser un commentaire